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Révocation nulle, Machiniste-Receveur réintégré :

la RATP condamnée pour discrimination syndicale, révocation brutale et vexatoire et manquement à l'obligation de sécurité

Par Xavier DUBOIS, Avocat au Barreau de Paris

Par un arrêt rendu le 28 février 2024, la Cour d’appel de PARIS a ordonné la réintégration d’un Machiniste-Receveur de la RATP, après avoir constaté que la révocation pour faute grave de l’agent, prononcée à son encontre en novembre 2019, n’était pas fondée et que la rupture de son contrat de travail avait en réalité pour seule origine une discrimination fondée sur ses activités syndicales.
 
La rupture du contrat de travail est par conséquent nulle.
 
La RATP accusait indument son agent d’avoir commis des manquements à la règlementation de l’entreprise et d’avoir exécuté de manière déloyale le contrat de travail au moyen d’agissements frauduleux :
 

  • conduite non-conforme au tableau de marche de la ligne,

  • non-respect des consignes du régulateur entre le mois de juin 2019 et le mois de septembre 2019,

  • sortie en retard depuis le centre bus,

  • génération de pertes kilométriques commerciales,

  • génération indue de temps supplémentaires à son profit à raison de temps de rentrée au centre bus anormalement longs, de temps injustifié entre la fin de son service et le retour au centre bus, de délais anormalement longs entre sa rentée au centre et le pointage à fin de service, ainsi que de retards anormaux et injustifiés sur ligne.

 
La Cour d’appel a ainsi retenu que les griefs formulés à son encontre n’étaient pas fondés, que l’agent n’avait commis aucune faute grave mais qu’il avait en revanche été victime, de la part de la RATP, de discrimination syndicale, la Régie étant dans l’incapacité de démontrer que la révocation de l’agent était justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
 
L’agent faisait valoir que la RATP avait simplement entendu lui faire payer son engagement syndical passé, une fois son mandat terminé, sa révocation étant intervenue juste après la fin de sa période de protection et l’employeur étant informé de ce qu’il était désormais accrédité par la CGT RAPT sur le Département BUS.
 
Outre la condamnation à lui verser une indemnité d’éviction, à hauteur de 159.526,43 €, et 15.952,64 € à titre d’indemnité compensatrice de congés payés sur cette indemnité, la Cour d’appel a également sanctionné la RATP à raison de la discrimination syndicale subie, à hauteur de 3.000,00 € à titre de dommages et intérêts, compte tenu des circonstances dans lesquelles cette discrimination était intervenue, de sa durée et de ses conséquences dommageables pour l’agent.

Elle a en outre sévèrement sanctionné la RATP en la condamnant à régler à son agent la somme de 5.000,00 € supplémentaires à titre de dommages et intérêts en raison des conditions brutales et vexatoires dans lesquelles la révocation pour faute grave était intervenue :
 
« il prouve que la procédure disciplinaire est intervenue dans des circonstances vexatoires du fait qu’il était accusé de fraude sur les temps supplémentaires pour augmenter indûment ses revenus et que le dossier disciplinaire a été monté exclusivement à partir d’extractions numériques sans la moindre vérification ou enquête sur le terrain ; en outre, il prouve que la procédure disciplinaire a été mise en œuvre dans des conditions brutales comme cela ressort de la durée excessive de l’entretien préalable du 11 octobre 2019 qui a duré plusieurs heures et a nécessité de "nombreuses pauses" (sic) comme en atteste [XXX], et a été à ce point éprouvant que [XXX] a fait une tentative de suicide sur le lieu de travail dans la salle de réunion vers 22 heures. »
 
La RATP est encore sanctionnée et condamnée à verser à son agent la somme de 3.000,00 € à raison du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, la Régie n’ayant pas respecté les restrictions médicales imposées par le Médecin du travail à l’égard de l’agent, restrictions que l’employeur avait enfreint à 22 reprises au cours de l’année 2017, 27 reprises au cours de l’année 2018 et 9 reprises au cours de l’année 2019.
 
La Cour d’appel accueille enfin la demande de l’agent à titre de dommages et intérêts pour non-bénéfice de la gratification liée à la médaille d’honneur d’argent des Chemins de fer, à laquelle il avait été proposé en décembre 2018 et dont il avait injustement privé à la suite de sa révocation pour faute grave.
 
 
CA Paris, Pôle 6 – Chambre 6, 28 février 2024, n°21/07289
https://www.dalloz.fr/documentation/Document?id=CA_PARIS_2024-02-28_2107289#texte-integral   

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